Contester un testament au Québec : comment faire ?

Contester un testament s’apparente à un parcours du combattant. Le contestataire entre dans une bataille juridique féroce qui peut s’étaler sur plusieurs mois. Les procédures nécessitent d’autant plus des connaissances pointues dans le domaine et relèvent des compétences d’un avocat spécialisé. Avant de vous embarquer dans une telle opération, prenez connaissance de l’étendu du travail qui vous attend.

Quels sont les motifs de contestation d’un testament ?

Plusieurs raisons peuvent motiver la contestation d’un testament : l’incapacité mentale du testateur, la remise en doûte du consentement d’un des signataires, des legs illégaux, l’inscription en faux ou encore le comportement indigne de l’héritier.

L’incapacité de tester du testeur

Au moment de tester, le testateur doit être en mesure d’exercer pleinement ses droits, selon le Code Civil du Québec. En d’autres mots, il doit avoir toute sa capacité mentale et toute sa lucidité.  Il doit être capable de donner son consentement libre lors de la rédaction de ses derniers souhaits.

Dans le cadre d’une contestation, le contestataire doit alors prouver l’incapacité de tester du testateur lors de la rédaction de son testament afin d’obtenir sa nullité. Cependant, fournir des preuves n’est pas chose facile. Le testateur ayant rendu l’âme, le contestataire n’a nul autre choix que de se référer  aux témoignages et aux dossiers médicaux afin d’appuyer ses propos.

Lors de la rédaction du testament, la présence d’un notaire est certes indispensable. L’officier ministériel s’assurera de la stabilité mentale de la personne et de sa capacité à donner son consentement libre et éclairé durant les travaux de rédaction du testament. Cependant, il n’est en rien un expert médical et ne peut ainsi confirmer sur une base médicale la capacité de tester du testateur. Par conséquent, même un testament notarié peut être remis en question sur la base de l’incapacité du testeur.

La captation testamentaire

L’annulation d’un testament peut aussi faire suite à une captation testamentaire. Motif complexe, la captation désigne la manipulation dont le testateur fait l’objet afin d’influencer son jugement et ses dernières volontés. Le contestataire avance ainsi des manœuvres, des mensonges, voire des menaces d’un individu de mauvaise foi à l’encontre du défunt.

Exercer une pression externe dans le but de modifier le contenu afin de récupérer les bénéfices durant l’ouverture du testament constitue une méthode frauduleuse. Elle n’est en aucune manière reconnue par le Code civil.

Prouver la situation de captation est aussi complexe, en raison de la subtilité de la manipulation. Vous devez vous fonder sur les témoignages et les présomptions afin de prouver les faits. La présence des témoins est d’autant plus indispensable devant les tribunaux.

L’avis d’un expert, en l’occurrence, un avocat spécialisé en droit des successions est de mise. L’expert vous conseillera sur les démarches à entreprendre afin de prouver la captation testamentaire.

Le non-respect de la forme du testament

Le Québec admet 3 formes de testaments valides :

  • le testament olographe ;
  • le testament devant témoins ;
  • le testament notarié.

Le testament olographe désigne un document rédigé et signé à la main par le testateur. Après son décès, le document fait l’objet d’une démarche de vérification minutieuse.

Le testament devant témoins peut être écrit à la main, à la machine à écrire ou à l’ordinateur. Le testateur signe le document devant au minimum 2 témoins majeurs aptes et non concernés par son contenu.

Testament le plus commun, le testament notarié ou le testament authentique a été rédigé par un notaire en présence d’un témoin. L’intervention de l’officier ministériel rend l’acte notarié difficile à contester, mais pas impossible.

Il existe également un testament rare appelé testament mystique. Sa validité requiert certaines conditions. Il a été rédigé par le testateur ou par un tiers, mais signé par le testateur et placé dans une enveloppe cachetée et scellée puis remis à un notaire en présence de 2 témoins. Le testateur déclare ensuite la conformité du contenu. La rédaction d’un acte de suscription du notaire qui inscrit la date, le lieu et la déclaration du testateur après réception du document est indispensable à la validité du testament mystique.

Le non-respect d’une de ces formes entraine l’annulation du testament pour cause de vices de forme. Néanmoins, le tribunal peut garder un testament partiellement conforme s’il répond un minimum aux conditions requises et s’il couche sur papier les dernières volontés du défunt.

Les legs illégaux et donc invalides

Dans le cadre d’une protection d’ordre public, la loi québécoise a limité les legs attribués aux héritiers. Afin de préserver le testateur des abus s’il se trouve dans une position de vulnérabilité en fin de vie et au moment de rédiger son testament, la loi a restreint les héritiers d’un testament.

Le Code civil (article 761 du Code civil du Québec et 276 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux) prévoit une présomption de captation et peut invalider le legs de biens au personnel de l’établissement de santé où résidait le défunt durant ses dernières années. Un testament attribuant des legs aux membres d’un établissement de santé peut ainsi être annulé.

La disposition règlementaire a été adoptée en raison des comportements répréhensibles ayant lieu dans ces établissements.

Sont également concernés : les aumôniers, les pasteurs, les notaires, les rabbins, les prêtes ainsi que toutes les autorités religieuses qui ont accompagné le défunt. La loi s’applique aussi aux propriétaires et aux employés des entreprises et des plateformes de services à la personne ainsi que les employés à domicile. Néanmoins, ces personnes peuvent percevoir une somme modique issu du patrimoine du défunt en guise de récompense à leur service.

L’inscription en faux pour contester un testament notarié

Le contestataire remet en cause la validité du testament notarié en faisant une demande d’inscription en faux. La requête est déposée au tribunal et permet de contredire un acte authentique.

La demande d’inscription en faux intervient si vous constatez une incompatibilité entre le contenu du testament rédigé par le notaire et les dernières volontés du défunt ou une erreur de l’officier public lors de la préparation du testament.

Pour éviter l’inscription en faux, le notaire a le devoir d’analyser la capacité de son client lors de la signature du testament, au risque d’engager sa responsabilité professionnelle. Cependant, n’étant pas un spécialiste médical, il doit se montrer prudent. Il s’entretient en tête à tête avec son client et peut même exiger un certificat médical pour confirmer son aptitude.

Le comportement de l’héritier à l’égard du testateur

Le demandeur peut attenter à la validation du testament à cause du comportement de l’héritier nommé dans le document. La maltraitance, l’ingratitude, l’intimidation, la prolifération d’injures ou de menaces, les fraudes, la négligence des dernières volontés du défunt et les tentatives malsaines en vue d’être avantager dans le testament sont autant de formes de maltraitances envers le testateur. Le tribunal pourra alors trancher en sa défaveur.

L’indignité d’un héritier peut aussi être évoquée s’il est tenu pour responsable direct de la mort du testateur, s’il a attenté à sa vie ou s’il a commis des voies de faits envers le légataire.

Comment contester un testament ?

La contestation ne se fait pas à la va-vite. Elle requiert de la patience et de la persévérance si vous souhaitez parvenir à vos fins.

Qui peut contester un testament ?

2 personnes sont en mesure de contester un testament : le testateur lui-même et ses héritiers. Après mure réflexion, le testateur peut révoquer le testament rédigé et l’annuler avec l’aide d’un notaire. Une disproportion de l’héritage, une incompatibilité aux attentes ou une évolution de sa vie personnelle peuvent être les raison de cette décision. L’intéressé enclenche alors un acte de changement de volonté du testament devant son notaire ou rédiger un nouveau testament qui annulera l’ancien. Dans le second cas, le nouveau testament indiquera l’annulation du précédent testament.

L’héritier peut solliciter le juge et demander l’annulation du testament s’il juge le contenu suspect. Il évoque les vices de fond, les vices de forme, l’indignité d’un héritier, les legs illégaux, l’incapacité du testeur ou l’inscription en faux.

Quel est le délai pour contester un testament ?

En se sentant désavantagé dans la succession, un héritier peut engager des procédures après avoir pris connaissance de son droit d’agir. Il dispose alors de 2 à 5 ans à partir de la date de décès du testateur pour engager les procédures.

Les démarches reposent sur le fondement de l’action : partage lésionnaire, vice de consentement, omission d’un héritier… Au-delà de 10 ans, les contestations de testament ne sont plus recevables.

Par ailleurs, contester un testament alors que le testateur est toujours vivant est impossible. Le document ne pourra être modifié que par son auteur jusqu’à son décès.

Quelles étapes suivre pour contester un testament ?

Mener à bien la contestation d’un testament passe par plusieurs procédures complexes nécessitant la présence d’un avocat pour vous assister.

Attendre le décès du testateur

Le testament est défini comme un acte privé et personnel appartenant uniquement au testateur tant qu’il respire. Même si les héritiers prennent connaissance du contenu du document, ils ne pourront effectuer aucune contestation avant le décès du testateur. D’ailleurs, la contestation des héritiers est inutile, car le testateur reste libre de modifier ses derniers souhaits à sa guise jusqu’à sa mort.

Après son décès surviennent les recherches testamentaires. Puis arrive l’ouverture du testament. Les principaux héritiers pourront ainsi réfuter ou accepter les dernières volontés du défunt.

Confirmer votre intérêt dans la contestation

Tous les testaments sont contestables. Cependant, vous devez trouver votre intérêt à enclencher les procédures. Avant toute tentative de contestation, vérifiez s’il existe un testament antérieur au testament actuel qui vous nomme héritier. Vérifiez aussi si une succession légale vous accorde le droit d’hériter. Sinon, abandonnez les procédures au risque de repartir bredouille même si vous ressortez vainqueur au tribunal.

Consulter un avocat et bénéficier de ses services

Récoltez les preuves avec l’aide de votre avocat en droit des successions. Le professionnel s’acquittera de plusieurs rôles :

  • préparation des requêtes ;
  • rédaction des requêtes et des documents légaux indispensables aux procédures ;
  • conseil sur les obligations légales de son client ;
  • représentation devant les instances judiciaires ;
  • évaluation de l’intérêt de son client ;
  • proposition une solution à l’amiable afin de débloquer l’héritage dans les brefs délais ;
  • identification des preuves pour révoquer judiciairement un testament frauduleux ;
  • initiation à une action en réduction pour faire valoir un partage inégal entre les héritiers légitimes.

Votre avocat vous éclairera aussi sur vos chances de succès devant les tribunaux.

Préparer les procédures de contestation

La contestation se traduit par une série de procédures au greffe de la cour. Vous devez aussi contacter les avocats de la partie adverse. L’ensemble des démarches semble complexe sans l’intervention d’un avocat pour vous épauler. Il fera aussi son possible afin de pencher la balance en votre faveur et prouver l’invalidité du testament sur la base de vos affirmations.

Quelles sont les conséquences d’une contestation de testament ?

L’invalidation du testament, après décision du tribunal, vous confronte à 2 scénarios. D’un côté, le testateur peut avoir préparé un autre testament. Il remplacera alors celui déclaré invalide. De l’autre côté, le seul testament rédigé a été déclaré invalide et donc vous obtiendrez votre héritage suivant la dévolution légale. Dans ce cas, la succession se passe selon les dispositions prévues dans le Code Civil du Québec.

A tous les égards, le testament annulé est privé d’effet pour l’avenir et pour ses effets passés.

Existe-t-il des alternatives à la contestation d’un testament ?

Au lieu de remettre en question la validité d’un testament, les héritiers peuvent recourir à 2 solutions : l’action en réduction et la révocation judiciaire.

En quoi consiste l’action en réduction ?

La réserve héréditaire désigne une part minimale légale de la succession qui se destine aux héritiers privilégiés répondant au nom d’héritiers réservataires (généralement les enfants). Appelées la quotité disponible, la part des biens et la part des droits successoraux qui ne sont pas réservées peuvent être distribuées librement par le testateur.

Cependant, il arrive que le contenu du testament porte atteinte à la réserve héréditaire. Les héritiers réservataires agissent alors en réduction afin de couvrir la part de succession qui leur revient de droit. Ils ont 5 ans à partir de l’ouverture de la succession pour effectuer l’opération judiciaire.

Qu’est-ce que la révocation judiciaire ?

La révocation judiciaire du testament définit une décision autoritaire qui annule une situation juridique. Elle rend un testament nul, caduc et le prive d’effet pour l’avenir. Plusieurs motifs entraînent la révocation judiciaire. Outre l’ingratitude d’un héritier, la non-exécution d’une tâche ou l’irrespect des conditions du testateur (entretenir un bien en particulier, payer les études d’un héritier, verser une rente viagère à une personne spécifique…) conduit à l’annulation du testament.

Conclusion

Contester un testament est une opération fastidieuse qui amène à une série de procédures légales. Vous devez vous soumettre à une pluralité de formalités judiciaire. Pour mener la mission à bien, l’intervention d’un avocat est indispensable.

Afin d’éviter toute éventuelle contestation testamentaire, la meilleure solution est de convaincre le testateur de son vivant sans passer par les méthodes frauduleuses.