Tout savoir sur le bail emphytéotique au Québec

Du grec “ἐμφυτευσειν” qui signifie planter, le bail emphytéotique est un contrat spécifique utilisé par les propriétaires d’un bien immobilier à des fins de location mais dont le statut différe d’un contrat de location classique. Uilisé fréquemment par le passé, ce type de contrat est devenu inconnu du grand public. On vous explique tout !

Tour d’horizon sur le bail emphytéotique

Le bail emphytéotique accorde plusieurs privilèges inexistant dans un bail classique, mais lesquels ?

Qu’est-ce que le bail emphytéotique ?

D’après le Code civil du Québec, le bail emphytéotique est une formule permettant à une personne se s’approprier un bien et d’en tirer tous les avantages durant un délai limité mais dont le statut diffère d’un propriétaire.

Ce contrat de bail confère à l’emphytéote un droit réel sur le bien pendant 10 à 100 ans. La durée varie néanmoins d’un pays à un autre.

L’emphytéote utilise et exploite le bien-fonds pendant la durée convenue en échange de 2 contreparties : le versement d’une somme modique en guise de loyer et l’engagement à entreprendre des travaux d’amélioration pour rehausser la valeur du bien.

Quelle est la différence entre le bail emphytéotique et le bail de location classique ?

Le contrat sépare le foncier de la construction, c’est-à-dire, le terrain du bâtiment, à l’inverse du bail classique.

Le bail emphytéotique transforme le preneur en un quasi-propriétaire du bien. Il peut hypothéquer le bien ou y construire des immeubles afin de les louer.

Il s’engage toutefois à entreprendre les travaux d’amélioration indispensables et à restituer le bien dans sa totalité au propriétaire en fin de bail.

Quels sont les avantages du bail emphytéotique ?

Le contrat comporte un panel d’avantages qui profite aussi bien au bailleur qu’à l’emphytéote.

Pour le bailleur

La formule valorise son bien sans apport financier de la part du “locataire”. Le propriétaire échappe aux contraintes locatives en cas de travaux, en l’occurrence : la réduction de loyer et relogement du locataire lors des ouvrages. Il s’affranchit aussi de l’obligation de versement d’une compensation financière au locataire pour les travaux réalisés.

L’emphytéote peut ajouter dans le contrat une clause spécifique prévoyant une indemnisation de ses travaux. Cependant, le propriétaire est libre d’accepter ou de refuser cette proposition.

Le manquement au canon emphytéotique (le loyer) l’autorise à enclencher les démarches de résiliation du bail. De même, la résiliation est possible s’il constate et prouve des dommages perpétrés au bien durant la location.

Pour le locataire “emphytéote”

Bien que l’emphytéote ne peut vendre le bien, il est en droit de :

  • Faire des modifications du bien ;
  • Réaliser un aménagement et des améliorations du bien sans attendre le consentement du propriétaire ;
  • Verser un canon emphytéotique ;
  • Louer ou sous-louer le bien ;
  • Hypothéquer le bien ;
  • Acquérir une servitude ;
  • Exploiter le bien comme il le souhaite.

L’emphytéote jouit aussi du droit d’accession. En d’autres mots, il profite pleinement des produits issus du bien (carrières, mines, arbres fruitiers…).

Quels sont les inconvénients du bail emphytéotique ?

La formule, bien qu’alléchante, cache aussi des vices notamment pour l’emphytéote.

Pour le bailleur

Le contrat intéresse essentiellement les communautés religieuses et les institutions publiques propriétaires d’un bien ainsi que les promoteurs immobiliers. Ces derniers peuvent y ériger de grands immeubles et percevoir une rente annuelle de leur investissement. Cependant, ils ont tendance à ralentir leur investissement à l’approche de l’échéance du contrat, ce qui diminue la valeur du bien. Au terme du contrat, le bailleur se retrouve ainsi avec un bien dévalué.

Pour le locataire

Le renouvellement du contrat n’est pas automatique. A la fin du bail emphytéotique, le propriétaire reprend son bien. Les 2 parties peuvent contracter un autre bail et conclure un nouveau contrat emphytéotique. Toutefois, le bailleur peut refuser le renouvellement, mettant à mal l’activité du locataire (notamment s’il pratique une activité commerciale).

De plus, il doit analyser au préalable la viabilité économique de son projet, sachant que la valeur ajoutée qui découle des travaux d’amélioration reviendra au propriétaire à la fin du contrat.

Quelles sont vos obligations dans un bail emphytéotique ?

Le manquement à une obligation de la part du propriétaire ou du locataire remet en question la validité du contrat et peut déclencher les procédures de résiliation.

Les droits et les devoirs du propriétaire

Le bailleur du bien immobilier ou du terrain loué est en droit de demander la résiliation judiciaire du bail emphytéotique dans 2 cas de figures : le non-respect des termes du contrat (notamment sur les travaux d’amélioration) et les détériorations sur le fonds du locataire.

Les charges liées aux constructions et aux améliorations du locataire profitent au propriétaire en fin de bail. Néanmoins, une clause peut exiger une compensation pour le compte du locataire. En son absence, le propriétaire n’est nullement tenu de verser une quelconque indemnité.

Le propriétaire peut aussi vendre ses droits du bail emphytéotique.

Les droits et les devoirs du locataire

Le contrat de bail emphytéote somme le locataire de :

  • verser une redevance ou un canon emphytéotique dans les délais impartis et suivant les modalités inscrites dans le bail ;
  • effectuer des travaux d’amélioration du bien ;
  • s’acquitter des taxes foncières du bail commercial, du bail professionnel ou du bail de location appliqué à l’immeuble ;
  • entreprendre les réparations nécessaires sur les constructions mentionnées dans le contrat originel.

Le locataire n’est pas autorisé à changer profondément le bien par une action délibérée Il n’est pas tenu d’améliorer les vices de construction antérieurs au bail.

L’emphytéote possède une grande liberté d’exploitation du bien loué. Ainsi, il peut poursuivre l’exploitation de carrières et de mines existantes sans l’aval du bailleur.

Par ailleurs, le propriétaire ainsi que le locataire peuvent faire appel à un avocat en droit immobilier s’ils se heurtent à un problème avec leur contrat.

Comment conclure un bail emphytéotique dans les règles ?

La conclusion d’un bail emphytéotique est soumise à quelques conditions et modalités.

Les conditions pour conclure un bail emphytéotique

La validation du contrat de bail emphytéotique demande la présence d’un notaire. Le professionnel est en charge de publier le contrat au bureau des hypothèques territorialement compétent.

Sa présence est obligatoire, peu importe la durée du contrat de bail et le type de bien à louer. Son absence compromet donc la validité du contrat de bail. Par conséquent, la conclusion du bail implique des frais de notaire.

  1. Identification des parties: Identifiez clairement le bailleur (le propriétaire du terrain) et l’emphytéote (le locataire).
  2. Description du bien: Décrivez le bien qui fait l’objet du bail. Cette description doit être précise et détaillée.
  3. Durée du bail: Déterminez la durée du bail. Les baux emphytéotiques sont généralement de longue durée – souvent de 100 ans, mais cela peut varier.
  4. Loyer: Fixez le montant du loyer et les modalités de paiement. Le loyer peut être fixe ou variable, et il peut être payé annuellement, trimestriellement ou selon un autre calendrier.
  5. Droits et obligations des parties: Définissez clairement les droits et obligations de chacune des parties.
  6. Signature du contrat: Une fois que tous les détails ont été réglés, les deux parties doivent signer le contrat pour qu’il soit juridiquement contraignant. Il peut également être nécessaire de faire enregistrer le bail auprès d’une autorité foncière ou d’un autre organisme gouvernemental.

Les modalités de renouvellement et de résiliation du contrat de bail emphytéotique

Les modalités de renouvellement du contrat de bail emphytéotique diffèrent de celui du contrat de bail classique. Le bail emphytéotique ne peut être renouvelé par tacite reconduction. A l’échéance, les deux parties établissent un nouveau contrat si elles souhaitent reprendre le régime de location. Si le propriétaire est une collectivité territoriale ou un établissement public de santé, le contrat de bail devient un contrat administratif, mais il partage les caractéristiques d’un contrat de bail emphytéotique.

Le propriétaire a la mainmise sur le droit de cession du bail emphytéotique. Il peut l’interdire ou le restreindre. La cession du bail à un tiers s’applique dans la limite de la durée initialement prévue dans le bail.

Comment utiliser le bail emphytéotique ?

Le bail emphytéotique s’appliquait, à ses débuts, uniquement dans les zones rurales, mais son usage s’est étendu dans toutes les régions.

Les cas d’utilisation du bail emphytéotique

Le bail emphytéotique a été créé, à ses débuts, pour entretenir, développer et préserver la rentabilité des vastes espaces ruraux. Le contrat permettait aux propriétaires de louer leurs terrains et les bâtiments agricoles et d’y effectuer des activités rurales.

Aujourd’hui, la formule a élargi ses horizons et concerne aussi les immeubles à usage industriel, à usage commercial, à usage culturel, les immeubles agricoles et les immeubles d’habitation.

La fiscalité du bail emphytéotique

Le contrat de bail donne à l’emphytéote un droit réel immobilier publié au fichier immobilier. Lors de la publication, la taxe de publicité foncière prend effet. Elle est estimée en fonction du montant des redevances prévues sur l’ensemble de la durée de l’emphytéose.

Le contrat de bail peut mentionner un droit de reprise des constructions à la fin du bail. S’il arrive à échéance dans 20 ans ou plus, aucune taxe ne s’appliquera sur les constructions.

Conclusion

Le bail emphytéotique distingue le foncier et le bien immobilier. Il s’applique aujourd’hui à tous les types de biens immobiliers, s’il se limitait autrefois aux espaces inoccupés dans les zones rurales. La formule se révèle intéressante pour les propriétaires de terrain et de bien immobilier qui souhaitent améliorer leur propriété et percevoir une rente annuelle. Elle profite aussi aux investisseurs en quête d’opportunité immobilière.

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