Faire face à une augmentation abusive de loyer

Chaque année après la révision du loyer, les locataires appréhendent une augmentation des loyers au Canada. Le phénomène persistant menace d’ébranler le marché prospère de la location immobilière dans le pays. Le fléau impacte aussi bien la situation financière du propriétaire que celle du locataire. Comment faire face à une augmentation de loyer de la part du propriétaire ?

Quelle règlementation encadre la tarification du loyer au Canada ?

Les propriétaires se soumettent au contrôle des loyers avant de déterminer leur tarification.

Les raisons d’une hausse de loyer

Le prix des loyer repose sur la grille tarifaire du Tribunal Administratif du Logement (TAL).

Plusieurs variables influencent la tarification : les dépenses du propriétaire pour son immeuble, les estimations moyennes des frais de gestion de l’immeuble, les primes d’assurances, les taxes municipales, l’énergie utilisée pour la production de chauffage (électricité ou gaz), les taxes foncières et les taxes municipales.

Compte tenu de la complexité de la tarification, un propriétaire est en droit d’augmenter son loyer même s’il n’effectue aucune opération de rénovation ni d’entretien.

Les obligations du propriétaire à l’augmentation du loyer

En vertu de l’encadrement des loyers et afin de modifier son contrat de location pour motif d’augmentation du loyer, le propriétaire transmet à son locataire un avis écrit dans un délai règlementé en fonction de la durée du bail :

  • 3 à 6 mois avant la fin du bail : pour un bail de 12 mois et plus ;
  • 1 à 2 mois avant la fin du bail : pour un bail de moins de 12 mois ;
  • 10 à 20 jours avant la modification de la demande : pour un bail d’une chambre ;
  • 1 à 3 mois avant la modification du bail : pour un bail à durée indéterminée.

Peu importe la durée du contrat, le propriétaire ne peut effectuer une modification qu’une fois tous les 12 mois, selon les lois sur les baux. Il peut aussi profiter de l’occasion pour modifier quelques lignes des conditions du bail.

La notification est envoyée par écrit et précise le montant de la hausse en dollars canadien ou en pourcentage. A défaut de notification, le bail sera reconduit suivant les conditions du contrat précédant.

Comment identifier une augmentation abusive de loyer ?

La hausse du loyer obéit à certaines conditions règlementaires édictées par le TAL. Le non-respect des critères peut être interpellé au tribunal par le locataire.

Quand une hausse du loyer est-elle conforme à la loi ?

L’avis d’augmentation de loyer comporte des éléments règlementaires :

  • le montant du nouveau loyer du propriétaire ;
  • le montant de l’augmentation exprimé en dollars canadien ou en pourcentage par rapport au loyer actuel ;
  • les autres modifications du bail ;
  • la durée proposée du bail si le propriétaire propose de modifier cette partie ;
  • le délai du locataire pour accepter ou refuser l’augmentation du loyer.

L’avis est envoyé à l’adresse du locataire mentionnée dans le bail. Le document est rédigé dans la même langue que celle de l’ancien bail. Le silence du locataire vaut acceptation du loyer.

Le locateur peut utiliser le modèle d’avis d’augmentation de loyer du TAL et le modifier en fonction des conditions spécifiques du bail.

Quand une hausse du loyer devient-elle abusive ?

La réglementation des loyers n’impose aucun taux fixe à l’augmentation des loyers. Elle liste plutôt une pluralité de critères susceptibles de varier le taux d’augmentation du loyer actuel (hausse des taxes municipales, hausse des taxes scolaires, travaux importants réalisés et à réaliser sur l’immeuble, hausse des primes d’assurance…).

L’ampleur des réparations de l’immeuble influence aussi la hausse du loyer. Les travaux de réparations qui concernent l’ensemble des locataires entraînent une hausse du loyer qui s’applique à tous les locataires. Cependant, des réparations qui n’affectent qu’un unique appartement engendrent une hausse uniquement pour celui concerné.

Suivant l’indexation des loyers, le TAL impose un indice moyen sur l’augmentation moyenne des loyers. En 2023, le taux a atteint environ 2,3 % pour un logement non-chauffé, contre 2,9 % pour un logement chauffé. Une hausse qui dépasse l’indice moyen légal ainsi que les taux variables peut être considéré comme une augmentation illégale de loyer.

Le site web du TAL met à disposition un outil de calcul d’augmentation du loyer qui déterminera la légalité de la hausse de votre loyer.

Si vous constatez une hausse déraisonnable du loyer, sollicitez l’intervention d’un avocat en droit du logement. Il vous assistera en cas de litige locataire-propriétaire. Il vous servira aussi dans la démarche de médiation locative.

Quels sont les recours pour les locataires victimes d’augmentation abusive de loyer ?

Le locataire est en droit de refuser, de négocier ou d’attenter une action en justice contre la hausse du loyer, s’il juge la somme déraisonnable.

Le refus du locataire

Le refus fait partie des droits des locataires. La décision doit être avisée au propriétaire par écrit, ce qui entraînera 3 scénarios :

  • le propriétaire ne manifeste aucune réaction, dans ce cas, le bail renouvelé reste inchangé ;
  • le propriétaire négocie pour parvenir à une entente à l’amiable ;
  • le propriétaire s’adresse au TAL qui prononcera l’augmentation finale du loyer.

Le propriétaire ne peut évincer le locataire et le chasser du logement pour cause de refus de l’augmentation du loyer, au risque de frôler l’abus de pouvoir. Toutefois, s’il intente un recours au TAL et demande une fixation de loyer, il vous enverra plusieurs documents règlementaires :

  • une notification de la demande de fixation de loyer ;
  • la preuve de notification de la demande au TAL dans 45 jours ;
  • le formulaire de calcul du TAL dûment rempli ;
  • une preuve du dépôt du formulaire complété au dossier du TAL ;
  • une preuve de la notification du formulaire au TAL dans les 90 jours à compter de la réception du formulaire.

Le TAL convoque les 2 parties à une audience. Le tribunal de la location analysera la conformité ou non du nouveau montant du loyer à la loi.

La négociation

Les experts immobiliers conseillent la négociation entre les parties prenantes avant de démarrer une longue procédure au tribunal. La négociation sous-entend, pour le locataire, un refus de l’avis d’augmentation tout en restant dans logement.

Le locataire fait part de sa décision de trouver un terrain d’entente. Le propriétaire a alors un mois pour ouvrir un dossier en fixation de loyer. Il incombera au Tribunal de fixer le montant du loyer (à la hausse ou à la baisse en fonction des justificatives reçues).

L’intervention d’une régis du logement

Le mois qui suit son refus, le locataire peut s’adresser à la Régie du logement qui se prononcera sur le litige locataire-propriétaire. Un régisseur sera mandaté pour évaluer la hausse du loyer et étudier les circonstances de cette hausse (dépenses d’entretien, frais de service, taxes, frais énergétiques, travaux…). La décision du régisseur ne peut être révoqué ni par le propriétaire ni par le locataire.

Le locataire peut aussi tenter de négocier une augmentation raisonnable qui profitera au 2 parties. Il fait alors usage de l’outil de calcul de la Régie du logement afin de faciliter la négociation.

La cession de bail

La cession de bail est une solution de dernier recours pour les locataires soumis à une augmentation abusive de loyer. Elle s’inscrit d’ailleurs dans les mesures de protection des locataires. Les propriétaires ne peuvent refuser la requête à moins d’avoir un motif sérieux : insolvabilité de la personne ou mauvais antécédents conduisant à une reprise du bail.

La cession de bail permet au locataire de se libérer du contrat de bail et de le transmettre à un nouvel arrivant. Il devra alors trouver un candidat à présenter au propriétaire. Après l’accord de ce dernier, le bail sera repris suivant les mêmes conditions et au même prix.

La démarche débute sur l’envoi d’une notification d’une demande de cession de bail à l’intention du propriétaire. Si celui-ci résiste, le locataire peut saisir un huissier pour garantir la réception en bonne et due forme de la demande.

En cas de refus du propriétaire, le locataire peut saisir le tribunal.

Quelles sont les conséquences du refus d’augmentation de loyer ?

Tous les locataires ont le droit de refuser une augmentation de loyer. Malgré votre décision, vous avez le droit de rester dans votre logement avant l’expiration de votre contrat de location.

Une exception confirme cependant cette règle. Si l’immeuble a été construit au moins il y a 5 ans ou si l’affectation de l’immeuble a été modifiée il y a moins de 5 ans, vous n’avez pas le droit de refuser la modification. Dans ce cas, vous vous heurtez à une alternative. Vous serez contraint de quitter les lieux au terme de votre bail ou accepter les modifications du propriétaire.

Conclusion

Face à la hausse abusive du loyer, les locataires ne peuvent rester indifférents. La négociation, l’intervention d’un régis du logement ou la cession regroupent les solutions pour faire face au phénomène. Tout au long de vos démarches et afin de défendre vos droits, prenez contact avec un avocat en droit immobilier.

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