Quels sont les recours d’un héritier déshérité ?
A la suite du décès d’un proche survient la question de l’héritage. En principe, le conjoint survivant ainsi que ses enfants avec le défunt constituent les héritiers. Cependant, il arrive que le testament écarte de manière injuste les bénéficiaires légitimes des actifs du défunt en y désignant un tiers. Alors, comment intenter un recours pour un héritier déshérité.
Tout comprendre sur la succession
Si le testateur détient les pleins pouvoirs en matière d’organisation et de rédaction de son testament, que reste-t-il aux héritiers ?
La liberté absolue du testateur
Au Canada, la loi octroie la liberté absolue de tester aux personnes en mesure de le faire. Elle laisse le testateur désigner sans contrainte les héritiers de ses biens. Cette liberté n’offre ainsi aucune garantie à un proche de bénéficier d’une part de l’héritage. Par conséquent, tous les héritiers du testateur ne peuvent assurer une place dans le testament.
Malgré ce privilège, le testateur ne peut s’enrichir au détriment d’autrui. En d’autres termes, les biens acquis grâce aux services ou grâce à l’apport en bien d’un conjoint ne peuvent être négligés. Le conjoint a le droit d’intenter un recours en enrichissement injustifié, selon l’article 1493 du Code Civil du Québec.
Par ailleurs, le conjoint de fait ne peut récupérer une part de l’héritage, en l’absence d’un testament.
Les obligations du testateur envers les membres de sa famille
Le décès du testateur ne le libère guère de ses obligations à l’égard de ses enfants et de son conjoint ou de son ex-conjoint. Il ne peut échapper à la pension alimentaire. En l’absence d’une pension, les bénéficiaires réalisent une réclamation 6 mois après le décès afin de garantir le succès du recours.
A titre de rappel, l’obligation alimentaire est une institution primordiale du droit de la famille, notamment si elle est versée à un enfant en bas âge, un conjoint marié ou un conjoint en union civil financièrement dépendant.
En vertu des règles de la succession ab intestat (la succession sans testament), la loi a toutefois instauré un plafond à la contribution alimentaire. Elle ne peut dépasser la moitié de la part à laquelle l’enfant et le conjoint ont droit.
Et si le testateur fait preuve d’une mauvaise foi ?
Le testateur peut, de son vivant, changer les paragraphes de son testament selon son bon vouloir. Il peut revenir sur ses décisions et ses promesses d’héritage. Toutefois, les modifications ne peuvent dépasser la limite de la bonne foi. Le testateur ne peut abuser de sa liberté de modification. Un héritier ayant réalisé des services en échange d’un héritage peut demander une contestation de testament et percevoir des dommages et intérêts. La mesure s’applique dans le cadre d’un recours en enrichissement injustifié, selon l’article 1493 du Code civil du Québec.
Le montant des dommages sera calculé suivant la décision du tribunal. Il est, dans la majorité des cas, exprimé en pourcentage de la valeur totale de la succession.
Quels sont les cas d’invalidation du testament ?
Certaines situations invalident un testament. L’article 761 du Code civil du Québec prévoit que le personnel soignant d’un établissement de santé, dans lequel le testateur a reçu des soins, ne peut percevoir un héritage. Cette invalidation évince ainsi les paragraphes du testament qui stipulent le contraire.
En d’autres termes, le tribunal déclare nul un testament qui lègue des biens à une infirmière, un médecin ou toute autre personne qui travaille au sein de l’établissement de santé dans lequel le testateur a reçu des soins durant les derniers jours de sa vie. Cette disposition s’applique aussi aux notaires, aux personnalités religieuses…
Cette disposition a été appliquée en raison des manœuvres répréhensibles et des influences pour obtenir la faveur d’un testateur. Avant d’invalider le testament, le tribunal étudie l’état de santé, le contexte familial, le contexte social, le comportement, la vulnérabilité et l’âge du testateur lors de la rédaction de son testament.

Quelles sont les problématiques liées à l’héritage ?
Les privilèges du testateur et le droit de contestation des héritiers compliquent souvent la liquidation de la succession.
Les parts obligatoires des héritiers réservataires
L’article 912 du Code civil parle des héritiers réservataires. Il délimite la part d’héritage minimale pour chaque héritier ainsi que la quotité disponible que le testateur peut distribuer à sa guise (par un testament ou par donation). Il interdit ainsi au testateur d’écarter les enfants et le conjoint survivant de la succession.
La principale problématique consiste à déterminer la part du patrimoine réservée aux héritiers réservataires et la quotité disponible. Est pris en compte dans le calcul le nombre d’enfants. Un enfant unique hérite de la moitié de la succession du parent décédé, tandis que l’autre moitié peut être redistribuée à la guise du testateur. Avec 2 enfants, chacun reçoit un tiers du patrimoine, alors que le reste est versé librement par le testateur. Avec 3 enfants ou plus, la quotité disponible est d’un quart et les trois quarts restants sont redistribués aux enfants de manière équitable.
Ecarter un enfant de la succession, est-ce possible ?
En règle générale, le déshéritage d’un enfant est impossible. Cependant, le législateur propose une manière de contourner ce règlement, uniquement si l’héritier est indigne d’hériter. Les articles 726 et 727 du Code civil stipulent que toutes les personnes condamnées à une peine criminelle ou correctionnelle pour avoir tenté de donner la mort à un testateur est indigne d’hériter. L’auteur de l’acte peut être exclu de la succession. La loi s’applique aussi aux héritiers auteurs de témoignage mensonger ou de dénonciation calomnieuse donnant suite à des poursuites criminelles contre le testateur.
Par ailleurs, toutes les actions qui visent à démontrer un recel successoral ou un détournement d’héritage est condamnable et met fin à la succession.
Déshériter avec l’assurance-vie, comment faire ?
L’assurance-vie est un dossier hors-succession. Elle est exclue du calcul de la quotité disponible. Le défunt peut, de son vivant, souscrire une assurance-vie et y désigner un bénéficiaire quelconque pouvant être une personne hors du cercle familiale. La couverture déshérite ainsi un héritier spécifique, voire les enfants et le conjoint qui ne pourront intenter aucun recours.
Toutefois, un héritier lésé peut contester l’assurance-vie pour donation indirecte ou pour prime manifestement exagérée. Le recours nécessite l’intervention d’un expert, en l’occurrence un avocat spécialisé en droit des successions.
Comment engager un recours pour un héritier déshérité ?
L’héritier qui se sent lésé peut intenter un recours et obtenir justice.
Prendre contact avec un avocat en droit de succession
La première étape consiste à prendre contact avec un avocat en droit des successions. Il vous aidera à asseoir vos droits et à comprendre vos obligations.
Le recours en justice s’avère complexe compte tenu des variables pris en compte : présence d’une assurance-vie qui lèse un héritier, famille internationale, délai de prescription des actions en justice, nature du lien familial… L’expert juridique facilitera heureusement l’organisation de la succession.
Intenter une action en justice
Le recours en justice varie en fonction de la situation. L’héritier lésé peut intenter une réclamation alimentaire. Un héritier victime de la mauvaise foi d’un testateur recourt à un enrichissement injustifié. Ce même recours est valable pour le conjoint survivant lésé qui a pourtant contribué à l’enrichissement des biens du défunt.
Les autres héritiers peuvent contester les facultés mentales du testateur lors de la rédaction de son testament.

Comment éviter d’être déshérité ?
Pour éviter d’être lésé dans une succession, la meilleure option est d’obtenir le consentement du testateur de son vivant et de le persuader de vous inscrire dans le testament.
Communiquer avec le testateur
Le manque de communication engendre des tensions familiales, ce qui constitue la cause la plus fréquente de l’exclusion d’un héritier dans le testament.
La communication est essentielle et doit être à double sens. D’une part, le testateur exprime ses souhaits et ses attentes vis-à-vis de ses héritiers. D’autre part, les héritiers émettent leurs demandes à l’égard du testateur et de ses biens.
Connaître les procédures de liquidation de l’héritage
Rares sont les héritiers qui connaissent les procédures de partage des biens. Les difficultés qui surviennent à la réception de la succession les découragent à poursuivre la liquidation. A titre de rappel, la démarche repose sur les objectifs du donateur. Il peut décider de déposer des fonds dans une fiducie qui permettra de distribuer des actifs sur une période spécifique au lieu de léguer directement de l’argent aux héritiers. Il peut aussi contribuer financièrement à une police d’assurance et ensuite désigner les bénéficiaires de la prestation.
A tous les égards, l’héritier a intérêt à analyser les voies utilisées par le testateur pour le transfert des biens et connaître les instruments utilisés dans la liquidation. La précaution évitera la confusion et les mauvaises décisions.
Conclusion
Les héritiers réservataires, le conjoint marié ou en union civil peuvent intenter un recours en justice et contester un testament qui les écarte de la succession. L’opération implique l’intervention d’un avocat en droit des successions.
Malgré la présence de l’expert juridique, les procédures s’avèrent difficiles. C’est pourquoi la meilleure option est de communiquer avec le testateur de son vivant afin d’obtenir son aval et de figurer dans le testament.